Iniciativa Comunista, octobre 2025
Chaque jour, le charismatique président burkinabé, Ibrahim Traoré, ou IB comme l’appellent affectueusement ses compatriotes, est de plus en plus connu. Ce leader africain s’est d’abord fait connaître mondialement par ses propos lors du sommet Russie-Afrique de 2023, qui soulevaient haut et fort un vieux dilemme : indépendance et développement ou dépendance et sous-développement. Ces paroles ont été prononcées après des événements importants qui ne se limitent pas, loin s’en faut, au camarade capitaine IB ni au Burkina Faso, mais qui ont été prononcées après le lancement de l’Alliance des États du Sahel composée du Mali, du Burkina Faso et du Niger.
Cette alliance est avant tout le résultat du renversement des régimes fantoches de ces pays, fidèles au capital français et traîtres à ces peuples sahéliens. C’est le mouvement du militaire malien Asimi Goita qui a lancé la première pierre, comme le dit l’expression, en 2020, en prenant le pouvoir et en expulsant les troupes françaises qui, sous le prétexte de lutter contre le terrorisme, l’alimentaient, l’armaient et perpétuaient son existence. Derrière lui sont venus les militaires burkinabés en octobre 2022, dirigés au départ par un militaire autre que Traoré, qui a été destitué quelques mois plus tard pour inefficacité. Et enfin, en juillet 2023, au Niger, le président fantoche Mohamed Bazoum est renversé.
À ce stade de l’histoire, on pouvait considérer que les coups d’État démocratiques et populaires avaient été indépendants et strictement nationaux, bien qu’animés d’un esprit similaire et poursuivant des objectifs identiques. C’est logique si l’on considère la situation dans son ensemble : l’existence d’un problème important de terrorisme « djihadiste » (particulièrement aigu depuis la destruction made in OTAN en 2011 de la Libye Yamahiriya prospère et indépendante du colonel M. Kadhafi) qui occupait de vastes étendues des différents pays et commettait toutes sortes de massacres et de crimes contre la population locale ; une classe dirigeante corrompue, une bourgeoisie parasitaire dont le modus vivendi était la corruption la plus rampante, la trahison nationale et la subordination et la soumission aux intérêts impérialistes, principalement français ; la présence de troupes étrangères, essentiellement françaises, dont la présence était justifiée en termes de coopération antiterroriste, mais qui, en réalité, constituaient une aide indispensable pour les milices takfiristes et un frein stratégique aux efforts des forces armées nationales pour résoudre le problème (depuis que les mouvements militaires-populaires sont au pouvoir, ils ont trouvé d’innombrables preuves de cette vérité et sont capables de réaliser des progrès impressionnants, de regagner du territoire, etc.) ; et enfin, mais c’est la question la plus importante, les conditions de vie vraiment pénibles des classes populaires, privées d’infrastructures publiques, de services de santé et d’éducation, de protection contre les terroristes, d’eau potable, d’électricité… IB a représenté l’esprit de son peuple, qui souffre de tous ces maux, et a soulevé des questions essentielles de la manière suivante lors du IIe Sommet Russie-Afrique le 28/07/2023 :
Les questions que se pose ma génération sont les suivantes, si vous me permettez de résumer : nous ne comprenons pas comment l’Afrique, avec tant de richesses dans son sol, une nature généreuse, de l’eau et du soleil en abondance, est aujourd’hui le continent le plus pauvre. L’Afrique est-elle un continent affamé ? Et comment se fait-il que nos chefs d’État parcourent le monde pour mendier ? Telles sont les questions que nous nous posons et auxquelles nous n’avons toujours pas de réponses à ce jour.
Cependant, cette déconnexion des différents processus nationaux a été pulvérisée par une menace de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), soutenue par la France, d’intervention au Niger peu après le renversement du laquais Bazoum. À ce moment crucial, les gouvernements du Burkina Faso et du Mali ont rapidement resserré les rangs avec le Niger et ont proclamé qu’une agression contre ce dernier serait une agression contre les trois peuples simultanément. Cette action a démontré la hauteur de vue du processus de souveraineté nationale qui avait été engagé dans les trois pays, elle a démontré une grande clarté stratégique qui distinguait clairement les amis des ennemis.
Il convient de souligner un fait fondamental que de nombreux analystes, y compris certains communistes, ont volontairement ou involontairement ignoré : le soutien populaire aux coups d’État militaires a été, dans tous les cas, massif. Les masses populaires, les paysans, les artisans, les commerçants et les ouvriers sont descendus activement dans la rue pour soutenir les militaires qui défendaient les aspirations à une indépendance réelle, à la souveraineté nationale et au développement. Ce fait est essentiel car il définit la nature du renversement des gouvernements précédents et l’orientation classiste et politique des nouveaux gouvernements de transition. Nous parlons ici de processus nettement révolutionnaires, panafricains, menés par des militaires nationalistes anti-impérialistes, proposant un programme démocratique populaire et de développement endogène.
Un processus relativement similaire a été observé dans l’histoire récente avec la révolution bolivarienne au Venezuela, à la différence que l’aspiration à l’intégration régionale s’est accélérée infiniment plus rapidement et s’est concrétisée à une vitesse stupéfiante avec la création de l’Alliance des États du Sahel le 16 septembre 2023.
