SUPERNOVA n.9 2025
comité populaire d’entraide et de solidarité «DDF» à Saint-Denis
1- Pouvez-vous présenter votre comité, sa date de création et où il intervient ?
Notre comité populaire d’entraide et de solidarité a été fondé lors d’une réunion publique entre habitants et militants du quartier en novembre 2024, dans la cité Delaunay Duclos Fabien « DDF » à Saint-Denis.
2- Quelle est la composition sociale du quartier ?
DDF est un grand ensemble de logements HLM construit dans les années 60-70 typique de la banlieue parisienne, les habitants qui y vivent sont des prolétaires issus en grande majorité des différentes vagues d’immigration principalement nord-africaine et sub-saharienne. Les logements sont occupés essentiellement par des familles nombreuses et le quartier est largement touché par la privation d’emploi et la précarité, en particulier les jeunes.
3- Quelles sont les principales problématiques et contradictions auxquelles la population est confrontée ? (Logement, travail, criminalité, trafic de drogue, violences policières, manque de transports, etc.)
Il n’y a rien dans le quartier. Très peu de commerces, pratiquement pas de services et aucun divertissement mis à part quelques citys. Les gens sont complètement abandonnées par une mairie qui ne se préoccupe que de la gentrification du centre-ville. Tout est fait pour que les habitants quittent la cité : les bâtiments ne sont pas entretenus, mal-isolés et tombent en ruine, les professeurs manquent dans les écoles du quartier et la vie associative dépérit complètement.
Tout est fait pour que les habitants ne puissent pas s’organiser il n’y a pas de salles accessibles et les MJC sont controlés par la marie.
Comme nombre de quartier en France, DDF connait une présence policière majeure, de nombreuses descentes ont lieu, les jeunes connaissent des contrôles quotidiens. La construction d’un commissariat flambant neuf à l’entrée du quartier témoigne de la volonté de l’état de mettre au pas cette partie de Saint-Denis. Le trafic existe comme partout, mais il fait partie du décor et ne perturbe pas de manière majeure le quotidien des masses.
4- Quelles initiatives avez-vous mises en place pour organiser le travail de votre comité ?
Notre comité s’est forgé dans la lutte contre le bailleur social Plaine Commune Habitat qui administre le quartier, ce bailleur est géré directement par les élus du Parti Socialiste qui dirigent la ville et le département.
Notre comité s’est fondé autour de trois revendications : 1) l’installation d’extincteurs dans les caves de la cité, 2) la réparation des câbles dénudés et 3) le diagnostic électrique de l’ensemble des immeubles dans l’objectif de mettre fin aux coupures de courant que connaissent les habitants.
Nous avons organisé une pétition, puis un rassemblement devant le siège du bailleur, deux réunions publiques et des campagnes d’affichage pour dénoncer l’attitude du bailleur.
Loin d’être de simples luttes économiques notre comité a toujours mis un point d’honneur à expliquer que PCH n’était qu’une façade, celle d’un état : l’état bourgeois et que par conséquent nos mauvaises conditions de vie ne sont pas le fruit d’une simple mauvaise gestion mais d’une politique visant à maintenir les prolétaires dans notre position d’exploités dans le cadre du salariat, nous faire vivre dans des quartiers en pleine décrépitude et tout faire pour empêcher la classe de s’organiser.
Nous avons gagné notre lutte pour les extincteurs et la réparation d’une partie des câbles de la cité, nous poursuivons aujourd’hui notre combat pour de meilleures conditions de vie.
Récemment le bailleur a coupé l’eau en pleine canicule pour « réaliser des travaux », le CPES a réagit en organisant une distribution de packs d’eau à plus d’une centaine de famille.
Enfin nous portons des initiatives anti-impérialistes en organisant des tournois de foot et des repas populaires en soutien à la Palestine et aussi plus largement en solidarité avec ceux qui luttent dans l’état Français et ailleurs dans le monde contre le capitalisme et l’impérialisme. Ces événements très suivis dans le quartier sont particulièrement mobilisateurs en témoigne le dernier tournoi de foot que nous avons organisé et qui a réuni 150 habitants durant toute une journée.
Nous portons notre revendication pour l’accès à la culture et au sport pour la jeunesse dans notre quartier et dans la pratique nous avons mis en place un club de boxe populaire.
5- Avec quelles associations ou groupes intervenez-vous sur votre territoire ? (associations sportives, culturelles, sociales, etc.
Nous luttons avec tout ceux qui sont sincères et qui souhaitent se battre pour le quartier et pour les quartiers populaires en général, nous travaillons avec la Ligue de la Jeunesse Révolutionnaire qui agit sur la ville et dans le quartier, avec la Fédération Syndicale Etudiante qui nous aide depuis l’université Paris 8 mais aussi avec des associations d’éducation populaire : l’écho des sans-mots, avec des commerçants aussi, le comité Palestine de Saint-Denis, le Racoon Kai Boxing Club mais globalement il y a très peu de structures réellement actives dans cette zone.
6- Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées dans votre intervention ?
La loi n’est pas respectée par les bailleurs, par les mairies et collectivités territoriales, ces derniers utilisent des stratégies d’ignorèrent, font la sourde oreille à nos revendications et misent sur notre épuisement. Pour gagner une lutte nous sommes obligés d’imposer un rapport de force avec ces entités et pour cela il faut être très inventifs – la constitution ‘un véritable rapport de force avec ces machines bureaucratiques est un véritable défi.
7- Comment, selon vous, relier les problèmes du quartier aux contradictions plus générales : économie de guerre, répression, impérialisme… ?
Les Masses ne sont pas aveugles, elles ressentent au quotidien les effets de la crise générale de l’impérialisme, de la réactionarisation et de la marche vers la guerre imperialiste, le CPES en tant que forme d’organisation de classe nous permet de politiser ce que vivent les prolétaires de nos quartiers chaque jour.
En parlant de la Palestine, nous parlons de la lutte anti-impérialiste, en expliquant que l’argent pris sur les factures, sur l’éducation et sur les loisirs servent à financer le réarmement, nous parlons de la militarisation et enfin des violences policières vécues quotidiennement par les masses font pleinement partie de la réactionnarisation et ça tout le monde le sait dans le quartier.
Des luttes économiques nous allons vers les luttes politiques, le CPES mobilise politise et organise les masses des quartiers populaires en tant que comité de lutte comme embryon d’une nouvelle société.
8- Les luttes de résistance dans les quartiers (lutte contre la précarité, salaire pour les chômeurs, droit au logement, lutte anti-répression, antiracisme, anti-patriarcat, etc.) peuvent-elles aujourd’hui constituer un moment tangible de recomposition de ce précariat social qui vit dans les quartiers populaires ? Quel lien doit exister, selon vous, entre cette réalité sociale et le mouvement ouvrier organisé ?
Les quartiers populaires concentrent les masses les plus profondes de l’état Français, dans la banlieue parisienne ce sont des dortoirs pour la classe ouvrière, ce sont des viviers de luttes parce que ce sont des centres de vie là où il y a la jeunesse, les femmes, les travailleurs les chômeurs, c’est là où l’état est mis le plus en difficulté car c’est ici que l’escroquerie de la bourgeoisie passe le moins. Il n’est pas difficile de parler de révolution ou de boycott des élections dans un quartier populaire car personnes ne veut poursuivre cette vie, tout le monde a la rage et veut la fin du système d’exploitation.
En bref le lien est clair : les quartiers populaires en tant que cœur battant de la classe doivent être un centre de la lutte, bien-sûr il faut aussi être dans les usines, dans les universités etc mais les quartiers populaires doivent se transformer en quartiers révolutionnaire. Il faut relier le quartier à l’usine, le quartier à l’université afin de pouvoir unir la classe dans son ensemble autour de la nécessité de la Révolution Socialiste.