Sur la criminalité organisée…

SUPERNOVA n.9 2025

État, monde mafieux et politique de classe

Le capitalisme a le pouvoir de transformer en drogue, immédiatement et continuellement, le venin qui lui est lancé au visage, et de s’en délecter  » (1929) B. Brecht

Le thème du crime organisé, historique ou récent, a trop souvent été abordé sur la base d’idées courantes, largement répandues mais dépourvues de fondement scientifique (stéréotypes), ou de critères partiellement scientifiques (paradigmes) qui ne saisissent que certains aspects, comme l’association criminelle et la finalité économique, d’un phénomène complexe. Le crime organisé est un ensemble de groupes criminels agissant au sein d’un système de relations, menant des activités violentes et illégales, mais aussi formellement légales, visant l’enrichissement et l’acquisition de positions de pouvoir, s’appuyant sur un code culturel et bénéficiant d’un consensus social. Le crime organisé résulte de l’interaction entre plusieurs aspects : crime, accumulation, pouvoir, culture, consensus et repose sur le lien entre association criminelle et contexte social. Il s’agit d’un phénomène social impliquant diverses couches de la population, des secteurs des classes dominantes aux classes populaires, formant un bloc social où la fonction dominante est exercée par des acteurs illégaux (chefs) et légaux (professionnels, entrepreneurs, représentants de l’administration publique, de la politique et des institutions). Il faut éviter de superposer de manière simpliste des expériences différentes comme le banditisme des années 70 et le crime organisé marseillais d’aujourd’hui. Le développement du crime, son organisation du travail, ont profondément changé. Même dans le crime, nous observons un mécanisme de financiarisation lié à la phase impérialiste. Au cœur restent le trafic de drogue, la prostitution et des armes comme sources directes, le « raket » (racket) et la pénétration des activités économiques officielles, ainsi que l’utilisation des fonds publics. Dans une ville comme Marseille, on observe une forte présence criminelle dans le monde politique (multipartite), jusqu’au milieu syndical et bien sûr associatif. Cependant, l’élément impérialiste, lié au monopole, à la concurrence la plus féroce et à la financiarisation, traverse aussi l’économie « parallèle » criminelle. La financiarisation de l’économie a entraîné le démantèlement de l’économie réelle, productrice de biens et services, réduite à une fraction minime de l’économie globale, et une explosion des échanges financiers à pure fin spéculative, avec un mouvement quotidien de capitaux dépassant 2 000 milliards de dollars. Le système financier est très opaque, avec la prolifération des paradis fiscaux et des innovations financières (futures, dérivés, hedge funds, etc.), rendant de plus en plus difficile la distinction entre flux légaux et illégaux de capitaux. Sur le plan social direct, nous assistons à une « lutte de classes » au sein même du crime organisé entre les anciennes bandes et une vision plus globale et transnationale. Nous assistons à une guerre entre pauvres, des masses de très jeunes autochtones à Marseille sont remplacées par de nouveaux jeunes issus d’une immigration très récente. Il n’est pas rare de tomber sur TikTok sur des annonces pour travailler dans cette économie parallèle. La sociologie bourgeoise elle-même parle d’« ubérisation » du crime organisé. Face à cela, les réponses policières à Marseille se concentrent sur des opérations spectaculaires : “nettoyage” de quartiers, saisies d’armes ou de drogue. Mais ces réponses sont souvent superficielles, répressives à court terme, sans stratégie sociale ou économique. Elles visent des jeunes, souvent issus de l’immigration, utilisés comme main-d’œuvre jetable. L’État punit les exécutants mais jamais les financiers, les logisticiens ou ceux qui profitent vraiment du système. Le phénomène des émeutes qui ont touché Marseille en 2023 (un phénomène inédit dans la ville) était lié à cette dynamique, avec des bandes de jeunes « moins » liés au crime organisé et donc « hors contrôle »1. La criminalité organisée contemporaine ne se limite pas à la drogue ou au racket. Le crime organisé utilise aujourd’hui des instruments de la mondialisation : logistique transnationale, blanchiment par cryptomonnaie, exploitation des zones franches, recours à des paradis fiscaux. La cybercriminalité permet d’étendre son emprise politique et économique : fraudes massives, piratage de banques ou d’entreprises, attaques par rançongiciels. C’est un moyen de gagner en pouvoir et se maintenir à la tête du réseau de prédation. Les multinationales jouent un rôle actif dans le crime organisé. Elles profitent de régimes corrompus, exploitent des ressources illégalement (forêts, minerais, pétrole), ferment les yeux sur les conditions de travail esclavagistes. Les banques blanchissent l’argent du narcotrafic. Les entreprises par leurs chaînes d’approvisionnement, bénéficient de la traite humaine ou de la contrebande. Loin de s’opposer au crime, le capitalisme l’intègre dans sa logique.

Autre évolution majeure : la montée en puissance des femmes et des jeunes. Les femmes, longtemps cantonnées aux marges du monde mafieux, sont devenues cheffes de réseaux, gestionnaires de flux ou blanchisseuses d’argent. À Naples, en Colombie, ou en Russie, certaines ont remplacé les hommes tombés ou emprisonnés. En France aussi, on observe cette féminisation discrète mais réelle des structures, avec des responsabilités et un pouvoir autrefois très largement réservé aux hommes. Il est souvent difficile de penser la violence ou la criminalité des femmes, mais c’est justement l’image de “petite chose faible et fragile” qui rend possible pour les femmes devenues criminelles d’être de véritables atouts, exploités par les différents acteurs de la criminalité. Les jeunes, quant à eux, sont le prolétariat du crime. Utilisés comme chair à canon, sacrifiés dès 13 ou 14 ans, ils incarnent une nouvelle figure du travail précaire. Le crime devient leur école, leur entreprise, leur famille. Le capitalisme les jette dans le feu et l’État les envoie en prison.

Bien qu’il ait des racines historiques anciennes et conserve encore des traits culturels traditionnels spécifiques, au cours de deux siècles de développement capitaliste, le crime organisé a montré de manière toujours plus évidente qu’il n’était en rien une expression d’arriération mais un phénomène pleinement « moderne », capable d’agir aussi bien dans les économies périphériques que dans les zones centrales avancées. Pleinement intégré dans les rapports sociaux de production et les mécanismes de marché, il se caractérise par une force capable de rechercher et de cultiver des interactions avec la classe politique et les bureaucraties étatiques tout en adaptant ses modèles opérationnels à l’environnement économique et politique. C’est à partir de ce cadre d’analyse que nous devons partir. Nous ne voulons pas tomber dans la sociologie que nous laissons aux universitaires et aux centres d’études (qui vivent en étudiant les classes populaires… de manière parasitaire). Ce qui nous intéresse, c’est le rapport entre classes, organisation, répression étatique, crime organisé et résistance des masses populaires. C’est uniquement dans cette dynamique que nous souhaitons intervenir.

MARX ET LA CRIMINALITÉ

Les références à la criminalité et les études d’inspiration marxiste sur le crime organisé sont multiples, mais ce n’est pas l’objet de notre article2. Nous nous concentrerons spécifiquement sur l’élaboration théorique de Marx. Dans certains écrits de 1842, Marx aborde la législation de la Diète rhénane contre le vol de bois, c’est-à-dire la criminalisation d’une pratique séculaire selon laquelle les classes populaires avaient le droit de ramasser le bois mort. Avec cette nouvelle loi, une coutume ancestrale était désormais qualifiée de délit, et le jeune Marx soutenait que le droit n’était rien d’autre que la codification des usurpations de la bourgeoisie et la stigmatisation des usages des classes subalternes. Autrement dit : les délits et les droits naissent de la prédominance des intérêts qui dictent les normes et classent les comportements selon leur conformité aux intérêts dominants. L’effet de cette nouvelle loi est une distorsion lourde de conséquences. Marx s’adressait ainsi aux législateurs : « Tout en échouant à faire croire aux gens qu’il y a crime là où il n’y en a pas, vous réussirez à transformer le crime en un acte licite. » (Marx, 1850).

Cela nous permet de comprendre le lien entre crime organisé et criminalité des classes dominantes, légitimée par l’impunité ou formellement absoute par des actes de légalisation de l’illégalité.

De même, quelques remarques sur le rôle de la violence dans l’accumulation primitive et sur la propension du capital à épouser des formes éclatantes de criminalité : si elles servent les processus de valorisation alors elles peuvent s’avérer utiles. Dans le premier livre du Capital, en reconstituant les dynamiques de l’accumulation en Grande-Bretagne, Marx observait que dans certaines régions s’était formé ce qu’on appelait un gang-system (système des bandes). Les travaux agricoles gérés par des fermiers étaient effectués par des gangs, groupes organisés de quarante à cinquante personnes, femmes et jeunes des deux sexes, sous la direction d’un gangmaster (chef de bande), capable de « presser de sa bande la plus grande quantité possible de travail dans le temps le plus court » (Marx, 1864).

Les fermiers avaient intérêt à recruter ces gangs car les femmes et les enfants qui les composaient, sous une direction masculine, garantissaient un travail maximal. L’envers était un labeur excessif, des déplacements épuisants et la « dégradation morale des gangs », notamment en ce qui concernait les comportements entre les sexes : des jeunes filles enceintes très tôt, des enfants accros à l’opium… Pourtant, le gangmaster (aussi appelé the driver, « le surveillant »), bien que muni d’un bâton ne s’en servait que rarement et les traitements brutaux restaient l’exception. Il pourrait d’une certaine manière passer pour un « démocrate ». Nous avons ici affaire à un racket de main-d’œuvre qui ne recourt pas systématiquement à la violence, contrairement au crime organisé contemporain qui l’utilise comme moyen de contrôle sur ses « travailleurs ».

La violence est également centrale dans l’analyse de l’accumulation primitive, point de départ de l’accumulation capitaliste. Celle-ci « n’est rien d’autre que le processus historique de séparation du producteur d’avec ses moyens de production ». La structure économique de la société capitaliste découle de la dissolution de la société féodale, un processus transformant les producteurs en ouvriers salariés par l’expropriation des moyens de production. « L’histoire de cette expropriation est inscrite dans les annales de l’humanité en lettres de sang et de feu. »

Cette histoire se déploie à l’échelle mondiale à travers ce que Marx désigne comme les moments fondamentaux de l’accumulation primitive :

Le génocide et l’asservissement des populations indigènes des Amériques,

Le pillage des Indes orientales,

La transformation de l’Afrique en réserve d’esclaves.

Mais c’est en Angleterre, à la fin du XVIIᵉ siècle, que ces éléments se combinent systématiquement, avec l’entrelacement du système colonial, du système de la dette publique, du système fiscal, du protectionnisme et des nouvelles organisations du travail…

Les méthodes reposent en grande partie sur la violence la plus brutale, comme le système colonial. Mais toutes utilisent le pouvoir de l’État — violence concentrée et organisée de la société — pour accélérer artificiellement la transition du mode de production féodal vers le capitalisme. « La violence est la sage-femme de toute vieille société en travail. Elle est elle-même une puissance économique. »

En Angleterre, la violence s’est concentrée dans la forme État. Ailleurs, la transition du féodalisme au capitalisme a vu coexister violence institutionnelle et violence extra-institutionnelle. Pourtant, même en Angleterre, les choses ont évolué différemment : au début du XIXᵉ siècle, des groupes armés (les Volunteers) étaient encore au service des propriétaires terriens. Cependant, ces milices n’eurent pas d’avenir car l’État imposa finalement son monopole de la force.

La disposition du capital à s’allier aux crimes les plus abjects pour maximiser ses profits est illustrée par Marx à travers une citation de T.H. Dunning (mentionné comme « un écrivain de la Quarterly Review ») :

« Le capital a horreur de l’absence de profit ou d’un profit trop faible, comme la nature a horreur du vide. Avec un profit suffisant, le capital devient audacieux. Assurez-lui 10 %, et il s’emploiera partout ; 20 %, et il s’anime ; 50 %, et il devient téméraire ; pour 100 %, il foule aux pieds toutes les lois humaines ; à 300 %, il n’est pas de crime qu’il n’ose risquer, même au risque du gibet. Si le tumulte et la rixe rapportent, il y poussera. Preuve : la contrebande et la traite des esclaves. »

Marx nous explique pourquoi et comment, dans la société bourgeoise, le crime est lui aussi productif : ” « Un philosophe produit des idées, un poète des poèmes, un prêtre des sermons, un professeur des traités, etc. Un criminel produit des crimes. Si l’on regarde de plus près le rapport de cette dernière branche de la production au tout de la société, on reviendra de bien des préjugés. Le criminel ne produit pas seulement des crimes, mais aussi le droit criminel, et, par suite, le professeur qui fait des cours de droit criminel, et l’inévitable traité grâce auquel ledit professeur jette comme « marchandise » ses conférences sur le marché général. Il se produit de la sorte une augmentation de la richesse nationale, abstraction faite du plaisir que le manuscrit du traité confère à son auteur, comme nous l’assure un témoin compétent, M. le professeur Roscher. Le criminel produit d’autre part toute la police et la justice criminelle, les sbires, juges, bourreaux, jurés, etc. ; et tous les différents métiers, qui constituent autant de catégories de la division sociale du travail, développent des capacités différentes de l’esprit humain, créent de nouveaux besoins et, respectivement, de nouveaux modes de satisfaction. Ainsi, la torture a donné lieu aux inventions mécaniques les plus fécondes, et elle a occupé quantité d’honnêtes artisans à la production de ces instruments. Le criminel produit un effet tantôt moral, tantôt tragique, c’est selon ; ainsi rend-il « service » aux sentiments moraux et esthétiques du public. Il ne produit point uniquement des traités de droit criminel et le Code pénal, partant, des législateurs de droit criminel, mais encore de l’art, de la littérature, des romans et même des tragédies, comme cela est prouvé par la Culpabilité de Müllner, les Brigands de Schiller, et même par l’Œdipe et le Richard III. Le criminel rompt la monotonie et la sécurité quotidienne, banale, de la vie bourgeoise. Il empêche la stagnation et suscite cette tension et cette mobilité inquiètes, sans lesquelles l’aiguillon de la concurrence lui-même s’émousserait. Il stimule ainsi les forces productives. Alors que le marché élimine une partie de la population excédentaire du marché du travail, diminuant par conséquent la concurrence parmi les ouvriers, et empêche à un certain point le salaire de tomber au-dessous du minimum, la lutte contre le crime absorbe une autre partie de cette population. Ainsi le criminel joue le rôle d’une de ces « compensations » qui opèrent un nivellement approprié, et ouvrent maintes perspectives à des professions « utiles ». Les répercussions du crime sur le développement des forces productives peuvent être établies jusque dans les détails. Y aurait-il jamais eu des serrures aussi perfectionnées qu’il n’existe actuellement s’il n’y avait point eu des voleurs ? La fabrication des billets de banque aurait-elle atteint son degré de perfectionnement actuel s’il n’y avait pas de faussaires ? Est-ce que le microscope aurait été introduit dans le commerce courant (voir Babbage) sans trafic frauduleux ? La chimie pratique ne doit-elle pas autant à la falsification des produits et à l’effort pour la détecter qu’à l’honnête zèle du producteur ? Le crime, par ses moyens toujours nouveaux d’attaquer la propriété, fait continuellement surgir de nouveaux moyens de défense, et agit ainsi d’une façon tout aussi productive sur l’invention des machines que les grèves. Et si nous quittons la sphère du crime privé, est-ce que le marché mondial aurait jamais vu le jour sans crimes nationaux ? Et les nations mêmes se seraient-elles formées ? L’arbre du péché n’est-il pas aussi l’arbre de la connaissance, et cela depuis Adam ? Dans sa Fable des abeilles(1705), Mandeville avait déjà montré la productivité de toutes les diverses professions possibles, et il avait dégagé la tendance générale de l’argument que voici : « Ce que, dans ce monde, nous appelons le mal, tant moral que naturel, c’est le grand principe qui fait de nous des êtres sociaux, c’est la base, la vie et le point d’appui de tous les métiers et de toutes les occupations sans exception, c’est ici qu’il faut chercher la véritable origine de tous les arts et de toutes les sciences ; et […] du moment où le mal n’existerait plus, la société serait condamnée au déclin, sinon à périr totalement. » Il est évident que Mandeville est infiniment plus audacieux et honnête que les philistins apologistes de la société bourgeoise. »”

Théorie sur la plus-value, Karl Marx

Dans ce passage célèbre, nous assistons au renversement du concept de crime, en tant qu’élément fondamental de la production même, de la vie même du capitalisme.

LA GUERRE CONTRE LE CRIME

Le monopole de la violence et de la coercition peut ne pas être absolu. L’État n’a jamais détenu le monopole absolu de la coercition ; la classe dominante ne lui a jamais entièrement délégué cette fonction. Il existe des centaines de milliers de policiers privés, d’agents de sécurité, de membres d’organisations paramilitaires et d’espionnage qui ne relèvent pas des forces armées de l’État sans leur être opposés, par ailleurs. Certaines pratiques répressives jugées nécessaires par la classe dominante ou par certaines de ses fractions afin de maintenir la soumission des masses populaires ne peuvent, pour diverses raisons, être intégrées officiellement aux institutions de l’État. Cela s’explique en partie par la diversité des situations sociales, selon les régions du pays, à la faible hégémonie de la bourgeoisie et aux querelles internes à celle-ci. C’est pourquoi, ces pratiques ont existé et se pérennisent en empruntant des formes non officielles, tolérées voire encouragées ou au contraire réprimées par l’État, selon les périodes. De nombreux exemples peuvent illustrer ce propos : les mafias italiennes, les organisations criminelles d’Europe de l’Est ainsi que les cartels d’Amérique du Sud. Ces organisations liées indirectement aux intérêts de certaines fractions des classes dominantes, ont eu et ont encore une fonction anti-ouvrière et anti-populaire, en s’opposant directement aux organisations ouvrières et populaires. Elles jouent un rôle de fragmentation sociale en introduisant dans les quartiers populaires des logiques individualistes, violentes, concurrentielles, en miroir inversé des logiques capitalistes elles-mêmes. L’absence de monopole absolu de la coercition par l’État est donc un fait assez répandu, lié aux rapports sociaux concrets dans les sociétés, aussi bien à la périphérie qu’au centre impérialiste. En France, les organisations criminelles ne sont pas « anti-étatiques » ; elles exercent, dans les quartiers et au sein des associations ou des syndicats, une fonction de contrôle, de soumission et de répression à l’encontre de l’autonomie ouvrière et prolétarienne en général. La lutte contre le crime organisé, menée par les organes répressifs de l’État, existe bel et bien, tout en maintenant un lien réel entre ces organes répressifs, les classes dominantes et la criminalité organisée elle-même. Ce lien est à la fois économique — blanchiment, recyclage de capitaux, corruption — mais aussi politique, en tant qu’outil de fragmentation, de destruction des formes d’organisations populaires, et de justification pour le déploiement de l’arsenal sécuritaire. De plus, la lutte contre la criminalité sert également de mécanisme de « contrôle » des classes populaires. Si auparavant il était possible de parler de la précarité de la jeunesse sans trop s’attarder sur la délinquance, il devient difficile aujourd’hui de nier le lien grandissant entre les jeunes, leur précarisation et leur entrée dans la criminalité. La loi Attal de 2025, en « réponse » aux émeutes de 2023, officiellement intitulée « proposition de loi visant à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents », s’inscrit comme une nouvelle étape dans la criminalisation “juvénile” des classes populaires. Sous couvert de “restaurer l’autorité”, elle accélère la criminalisation des mineurs en appliquant la comparution immédiate dès 16 ans. Elle remet clairement en cause le principe d’atténuation de peine des mineurs, pourtant inscrit dans l’ordonnance de 1945 relative à la justice des enfants. Un changement idéologique est pleinement assumé : une individualisation de la faute imputable aux parents se subsitue à la responsabilité éducative, traditionnellement collective. Ces derniers seront alors sanctionnés physiquement par des travaux d’intérêt général, s’ils manquaient à leurs obligations éducatives et financièrement, par une amende en cas de non réponse à la convocation des enfants. En légiférant sur la figure du “parent défaillant”, la loi Attal s’inscrit dans cet imaginaire réactionnaire fondé sur la culpabilité individuelle, afin de mieux justifier le déploiement de cet ordre sécuritaire. Les quartiers populaires, considérés comme des foyers d’ensauvagement nécessitent alors une réponse punitive, non sociale, en parfaite cohérence avec les politiques jusqu’alors menées par ce gouvernement. Les lois anti-criminalité, vues dans une optique de classe (prolétarienne), représentent une forme supplémentaire de contre-révolution préventive, introduisant des formes toujours plus étendues et militarisées de contrôle social. Tant sur le plan législatif qu’administratif et policier, elles ciblent principalement les quartiers populaires et les classes subalternes. L’usage de la « chronique noire », du « monstre », reste un levier linguistique de la propagande sécuritaire, bien rôdé et largement usité. La proposition de loi sur le narcotrafic, adoptée au Sénat début 2025, illustre parfaitement l’hypocrisie d’un État bourgeois qui prétend lutter contre la criminalité tout en préservant les intérêts de sa propre classe. Elle crée ainsi un Parquet national anticriminalité organisé (Pnaco) et destiné à « frapper fort » contre les réseaux de drogue. Pourtant dans les faits, la répression se concentre systématiquement et massivement contre les petits dealers des quartiers populaires et les guetteurs pour la plupart mineurs. Dans les démocraties impérialistes, on ne cache pas le crime, contrairement aux anciens fascismes qui cherchaient à présenter une société harmonieuse. Dans les démocraties impérialistes, le crime est réprimé mais aussi exalté et utilisé dans le cadre d’une stratégie générale de contre-révolution préventive. Ce paradoxe apparent ne l’est pas pour qui comprend que le pouvoir ne cherche pas tant à éradiquer le désordre qu’à le gérer, à l’orienter, à s’en servir comme prétexte pour renforcer ses dispositifs de domination. La drogue, la prostitution, les rackets sont un cancer qui frappe les classes subalternes, avec leur cortège de drames et de misère3. L’ampleur de ces phénomènes est attribuable au même mécanisme qui régit la société dans son ensemble ; à savoir la recherche du profit. Ils sont à la fois combattus, tolérés et promus par ces mêmes forces sociales qui dominent la société. Sans recourir à une théorie du « complot », il est évident pour tous que le volume monétaire et productif lié à l’économie criminelle est considérable. Leur développement, dans certains cas, a été le fruit d’un calcul politique précis visant à affaiblir la capacité des secteurs populaires à s’organiser et à se doter de formes autonomes de résistance. C’est le cas, par exemple, du développement contrôlé du trafic d’héroïne dans les ghettos afro-américains dans les années 70, ou de la pacification coloniale via le contrôle des stupéfiants et des mœurs (prostitution) dans les colonies françaises. L’histoire, contemporaine en particulier, est parsemée d’exemples illustrant cette mécanique et ses liens étroits : les guerres de l’opium pour sa diffusion, menées par l’impérialisme britannique en Chine au XIXe siècle ou bien les stratégies de pénétration de l’héroïne dans les quartiers populaires des États-Unis et dans les banlieues ouvrières d’Europe en vue d’affaiblir directement les groupes révolutionnaires organisés dans les années 70 du siècle dernier. Ou bien encore l’utilisation directe d’investissement des organisations criminelles contre les “rouges” comme dans le cas des Contras (groupes armés contre-révolutionnaires nicaraguayens) financés par le trafic de drogue et employés en vue de mettre fin à la guérilla marxiste sandiniste, dans les années 80. Aussi, en parallèle, un autre instrument de propagande se développe : l’image de ces organisations criminelles véhiculée à travers les médias et productions artistiques suscite autant une valorisation qu’une fascination. Le culte du « gangster », d’hier à aujourd’hui, a toujours été une idéologie malsaine adressée aux classes subalternes et animée par la logique du mythe de l’individu, avec des rêves réduits à un ensemble de marchandises emballées… Le « mythe » autour de ces personnages cache l’usage opportuniste que la criminalité organisée fait du pouvoir des classes dominantes et de leur État.

Marx nous enseigne que les idées dominantes dans une société sont les idées des classes dominantes, car elles détiennent le pouvoir — et il serait illusoire de penser le contraire. Toutefois, il serait conformiste de croire que cela est immuable. Dès lors que les classes subalternes agissent, manifestent leur point de vue politique, leur autonomie d’action, ces modèles sont immédiatement tournés en ridicule. L’individu, son action voire son héroïsme, existent bel et bien, mais cela n’a de sens que dans une dimension collective. En dehors de cela, il ne reste que la vieille et la nouvelle merde bourgeoise de l’individualisme. Il ne faut pas s’étonner que, même aujourd’hui, la religion (du christianisme à l’islam) soit si présente dans les couches populaires — elle représente un faible mais tangible sens de défense collective face à la dégradation sociale liée à la dimension impérialiste centrée sur l’argent.

MARSEILLE, CAPITALE DE LA FRANCE…

Chaque gouvernement brandit le spectre de la criminalité lorsqu’il veut imposer davantage d’ordre. Ce n’est pas une nouveauté. Toutefois, la rapidité avec laquelle le plan législatif opère aujourd’hui nous montre une classe dominante profondément effrayée…

Ces récentes manœuvres gouvernementales en matière de contrôle et de sécurité sont justifiées par la nécessité de lutter contre une criminalité organisée de plus en plus ramifiée sur l’ensemble du territoire national. Et il est vrai que nous avons assisté ces dernières années à une transformation de la criminalité organisée en France, reflet des modifications dans l’organisation du travail et de la compétition globale qui affectent toute l’économie et la politique actuelles. Marseille, d’ancienne métropole périphérique, devient un modèle qui se généralise. Le modèle de sa criminalité organisée s’étend aujourd’hui à toute la France. Marseille, considérée par les organes du pouvoir central comme une ville de « dégradation sociale », devient le modèle national… Ce serait une erreur de superposer mécaniquement toutes les réalités, en imaginant un tableau homogène. Comme c’est le cas de la ville de Lyon. Ville bourgeoise, carrefour économique : Lyon n’a pas l’histoire portuaire de Marseille, mais elle est un centre logistique stratégique, entre Suisse, Italie et Méditerranée. Cela en fait un hub pour les trafics transfrontaliers (drogue, armes, blanchiment). La criminalité organisée y est plus discrète : la présence mafieuse est moins visible mais plus intégrée. Réseaux albanais, balkaniques, et italiens (Ndrangheta) agissent via des structures légales : restaurants, chantiers, entreprises de sécurité, immobilier. Dans des quartiers comme la Part-Dieu, Gerland, ou Villeurbanne, les investissements sont souvent alimentés par des capitaux d’origine opaque. Des sociétés écran, des flux via la Suisse ou le Luxembourg, permettent un recyclage “propre” du capital criminel. Lyon est un exemple marquant de ville à la « criminalité propre » : ici, peu de règlements de comptes médiatiques, mais une criminalité plus institutionnalisée, intégrée, liée aux marchés publics, à la corruption locale, et à la gestion indirecte mais bien réelle de certains secteurs économiques à haute rentabilité. Lyon représente la version discrète, bourgeoise, intégrée à l’économie légale, avec peu de violence visible, mais une efficacité économique criminelle réelle. Marseille illustre le cas d’une criminalité organisée visible, violente, médiatiquement exploitée. Il est clair pour nous que le modèle marseillais a su s’imposer et ressort « gagnant » dans le contexte actuel de crise, avec une implantation sur tout le territoire et un rayonnement international reconnu.

C’est un symptôme supplémentaire de la crise qui frappe la France sur les plans social, politique et économique. La réponse du gouvernement et des classes dominantes est liée, comme nous l’écrivions précédemment, à une peur sociale qui touche aussi bien les classes dominantes que la classe moyenne. La perte d’importance de la France sur l’échiquier international, la redéfinition des alliances et hiérarchies entre les États-Unis et l’Europe, l’érosion du « modèle social français », la crise de valorisation du capital productif, sont les principaux éléments de cette phase que nous traversons. Nous assistons ainsi à une polarisation sociale qui frappe fortement les quartiers populaires, les emplois ouvriers, et à une lente mais générale prolétarisation des classe moyennes. La lutte contre la criminalité organisée, tout comme la lutte contre le terrorisme, revêt donc une forte dimension idéologique, visant à ressouder les rangs, à retrouver une nouvelle unité nationale. En partie, cette opération fonctionne : toutes les forces politiques parlementaires (de la gauche à la droite) se plient à la logique du capital français, de la production française… La même campagne violente d’islamophobie, la répression généralisée de toute forme de dissidence antisioniste, doivent être lues comme d’autres symptômes de la campagne en cours, qui frappe le même bloc social, principalement concentré dans les ceintures urbaines populaires… Un prolétariat dé-intégré et sans réserve, élément principal de cette précarité sociale qui habite les métropoles impérialistes.

La demande de tribunaux spéciaux, de formes « extraordinaires » pour intervenir contre la criminalité, est une nouvelle démonstration d’un État d’urgence permanent. Comme pour l’anti-terrorisme, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg de stratégies destinées à renforcer le contrôle social et à prévenir toute forme possible de résistance, de lutte et de révolte du prolétariat sans réserve des métropoles, comme on l’a vu lors des émeutes de 2023, où immédiatement le gouvernement a attaqué les familles des quartiers populaires et a appelé à un nouveau système de législation répressive pour les mineurs. Ce n’est pas un hasard si le gouvernement s’inspire du modèle anti-mafia italien, avec ses tribunaux spéciaux et ses lois spéciales, parallèles mais autonomes par rapport à l’ordre juridique de l’État… L’histoire de l’anti-mafia en Italie est significative et nous permet de comprendre clairement le double rôle des appareils d’État et des mafias elles-mêmes. Il n’est pas rare dans l’histoire de l’anti-mafia italienne, depuis les années 1800 jusqu’à aujourd’hui, de constater que les principales figures chargées de la répression anti-mafia avaient « fait école » dans la répression politique.

Les préfets envoyés en Sicile (sud de l’Italie) à la fin du XIXe siècle étaient les mêmes qui avaient « géré » la répression contre le mouvement ouvrier dans le nord de l’Italie. Pour arriver à des figures plus récentes comme le général des carabiniers Carlo Alberto Dalla Chiesa à la fin du XXe siècle, connu pour avoir institutionnalisé la torture contre les militants des organisations communistes combattantes…

La mafia italienne a été à la fois un catalyseur social de masses prolétariennes sans réserve, et une structure de soutien au gouvernement italien et aux intérêts directs des classes dominantes. Son action s’est souvent dirigée concrètement contre le mouvement ouvrier : des massacres lors des cortèges ouvriers et paysans jusqu’aux exécutions ciblées d’activistes politiques communistes. Cette dimension parallèle de l’organisation criminelle nous permet ainsi de comprendre que la répression de l’État n’est pas univoque.

CONTRE LE CAPITAL, LUTTE CRIMINELLE…

Parler de criminalité organisée, c’est parler de milliers de prolétaires dé-intégrés en France, la main-d’œuvre de ces « entreprises » encadrées par des organisations de travail « illégales ». Cette partie de la société est le produit même de la société capitaliste. Sous l’impérialisme, leur nombre ne cesse d’augmenter. Ils sont utilisés par le capitalisme, en tant que société de consommation, comme consommateurs. Mais ce sont des consommateurs sans salaire. De cette contradiction naît la forte augmentation de la criminalité qui caractérise les pays impérialistes. Cette partie du prolétariat reflète de manière extrême le niveau immédiat de la conscience bourgeoise (consumériste) : individualisme extrême, aspiration à une consommation toujours plus grande. Mais d’un autre côté, elle reflète la conscience révolutionnaire, c’est-à-dire l’abolition de leur condition, d’où l’abolition de la société fondée sur le travail salarié. C’est dans ce contexte qu’il faut voir la fonction de la prison. La prison a avant tout une fonction terroriste à l’égard des prolétaires afin de les maintenir pieds et poings liés à la production capitaliste, avec son cortège de violence et de peur. Cependant, les prisons sont aussi des réservoirs :

1) contraints de vivre en communauté, on peut dépasser la mentalité individualiste

2) en se heurtant à la répression brutale (coups, cellules d’isolement, etc.), on commence à prendre conscience de sa condition et donc de la nécessité de s’organiser pour lutter4.

De là peut naître une prise de conscience vis-à-vis de l’ensemble de la société. Marx avait déjà identifié dans la diminution absolue du nombre d’ouvriers l’une des contradictions les plus déchirantes du capitalisme, arrivé à un haut degré de développement. « Un développement des forces productives qui aurait pour résultat de diminuer le nombre absolu d’ouvriers, qui permettrait en substance à toute la nation d’accomplir la production totale en moins de temps, provoquerait une révolution, car il réduirait à la misère la majeure partie de la population » Le Capital, K. Marx.

C’est donc le haut développement des forces productives dans la phase impérialiste et monopoliste qui place objectivement ces couches prolétariennes aux côtés de la classe ouvrière, dans la lutte pour le communisme. Il faut être clair sur ce point : intervenir dans les quartiers populaires ne remplace pas l’intervention sur les lieux de travail. La classe ouvrière reste la fraction de classe qui doit exercer son hégémonie sur les masses populaires. Ce n’est qu’ainsi que l’on dépasse le stade de la rébellion pour parvenir à la résistance organisée. La relation entre la classe ouvrière organisée et le prolétariat sans réserve dans la métropole n’est ni linéaire ni parallèle. Il existe souvent des canaux sociaux et culturels communs. Toutefois, les terrains d’organisation sont pour l’instant très éloignés. L’organisation de l’autonomie prolétarienne, sa capacité à se doter de formes d’organisation sur le territoire pour recomposer le « précariat social » et assumer les différentes problématiques est certainement une étape importante qui se concrétise au sein des collectifs de quartier, des comités contre la répression, des associations sportives populaires et de leur vivacité à entrer en relation avec les structures les plus dynamiques du monde syndical, du mouvement ouvrier organisé5. À cela s’ajoute la capacité d’autodéfense et « militaire », aujourd’hui considérée uniquement de manière stéréotypée ou reléguée aux oubliettes… Quiconque tente d’intervenir contre la criminalité organisée se trouve confronté au problème de l’État, de ses lois et de sa police. Des problèmes analogues traversent tous les comités et collectifs contre la répression et la violence policière. Lutter pour une démilitarisation de la police ne suffit pas, il faut parallèlement défendre le droit à l’auto-défense populaire et à la résistance. Se poser concrètement la question de « nettoyer » nos quartiers de la drogue, de la prostitution et des rackets, de manière indépendante. Dans les comités de quartiers, dans les syndicats, dans des collectifs spécifiques, il faut renverser le paradigme de la « légalité ». Notre « légalité » prolétarienne est, pour les classes dominantes, criminelle, car elle ne reconnaît ni leurs lois, ni leurs cages, ni leurs codes. Notre lutte ne doit pas utiliser l’État mais développer l’autonomie prolétarienne… Ne pas « aider » comme une énième ONG, ni rester sur le terrain de la « charité », mais placer au centre le protagonisme des classes dominées. Non pas fournir de « l’aide », mais de l’organisation et des instruments culturels, politiques, sociaux et militaires visant à renforcer et à structurer la résistance. Mais pour ce faire, il faut avant tout priver les organisations criminelles de leur capacité à recruter cette masse de jeunes et de très jeunes au sein de leurs organisations et lutter contre cette capacité. Alors, qui fait le ménage, eux ou nous ? Penser l’État comme une structure neutre est pire que de le penser simplement au service des classes dominantes. C’est la logique du « moindre mal » qui mène au pire… Car elle démobilise et renonce à la bataille pour le monopole de la violence contre les classes dominantes. Cela ne signifie pas renoncer à lutter contre les lois autoritaires et pour garantir des formes de « démocratie », mais ces mêmes luttes sont importantes pour leur signification plus profonde : la capacité de la résistance des masses populaires à accumuler expérience, organisation, et ainsi à faire émerger leur point de vue autonome — le nouveau monde qui lutte contre l’ancien !

1Des jeunes, très jeunes (entre 10 et 20 ans) sont descendus dans la rue. Se succèdent pillages, assauts de bâtiments publics et privés, destructions de voitures et de véhicules de police. Le soulèvement a forcé le gouvernement à emprisonner le policier qui a tué le garçon. Il est intéressant de noter que la police se plaint de la technique de guérilla urbaine utilisée par les émeutiers (petits groupes qui se déplacent et n’essaient pas d’affronter la police), qui permet une plus grande « liberté de mouvement » de la part des émeutiers. Cela n’a pas empêché la police d’arrêter plus de 3 000 personnes. Sur le plan politique, ce qui s’est passé est le résultat d’une dé-intégration sociale en France, et d’une prolétarisation plus générale de la société. Une tendance qui, selon nous, s’étend à l’ensemble de l’Europe. La particularité française est que nous nous trouvons dans une zone où la dimension de classe est entremêlée avec la dimension « raciale » liée aux logiques coloniales anciennes et nouvelles. “ Pour les jeunes voyous de la lutte des classes, Supernova 02 07 2023

2 Nguyễn Nghệ, Frantz Fanon et les Problèmes de L’Indépendance. Contradiction Edictions, 2023. Le livre contient en annexe un texte sur la signification et les positions de la gauche révolutionnaire sur le prolétariat extra-légal (Marx-Engels, Lénine, Mao, Fanon, Jackson): Interprétations du sous prolétariat – prolétariat extra-légal.

3 On accorde beaucoup d’importance au trafic de drogue et d’armes, mais on oublie souvent le trafic d’êtres humains et la prostitution. Dans la ville de Marseille, la prostitution, et en particulier celle des mineurs, touche profondément les quartiers populaires. Il n’est pas rare de voir des « proxénètes » recruter directement des jeunes filles dans les centres d’accueil pour filles …

4 Les luttes dans ce secteur reflètent leur « position » sociale et politique dans la société dans son ensemble. Il n’est donc pas absurde de penser que pour réclamer de meilleures conditions de vie dans les prisons, ils n’organisent pas de pétitions et de collectes de signatures, mais commencent à identifier des objectifs symboliques à atteindre directement… Si tel est le mécanisme « naturel » du criminel, on assiste à des modifications dans le cadre du crime organisé. Lors des récentes actions contre les prisons pour protester contre les nouvelles prisons spéciales, le crime organisé « commandait » les actions contre paiement. Dans ce cas, il ne s’agit pas de syndicalisme « armé », mais d’une « entreprise » qui commande un travail…

5 Le précariat social, Supernova n.7, 2024

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