Secours Rouge Marseille
supernova n.8
Publié par la revue Workers World (Usa) en décembre 2024 , traduit par le Secours Rouge-Marseille. C’est une lettre de deux frères du Parti Communiste ukrainien qui ont été arrêtés et torturés. Au début de l’année 2025, nous avons assisté à une nouvelle campagne de criminalisation des militants communistes. Les autorités ukrainiennes accusent le communiste non seulement d’appeler à la désertion, mais aussi d’avoir une « littérature marxiste », interdite en Ukraine dans le cadre de la « décommunisation ». Le groupe s’appelait « Front ouvrier ukrainien » et c’était un groupe marxiste-léniniste d’ouvriers et d’étudiants, qui seraient passés à la clandestinité en 2022
Chers camarades,
Nous souhaitons attirer votre attention sur le fait que nous, communistes et antifascistes, les frères Mikhaïl et Alexandre Kononovitch, avons été arrêtés pour nos nombreuses années d’actions pour la paix au sein du « Komsomol » (Ligue de la jeunesse communiste), que nous avons menées dans toutes les villes d’Ukraine depuis 2014.
La dernière de ces actions a eu lieu deux semaines avant le début de la guerre à grande échelle de 2022, devant la Verkhovna Rada (le Parlement ukrainien), sous le slogan : « Non à l’OTAN – Paix pour le Donbass ! ».
Seuls les communistes antifascistes défendaient la paix en Ukraine, et nous avons tout fait pour prévenir une « Troisième Guerre mondiale ». Aujourd’hui, être communiste et antifasciste en Ukraine est considéré comme un crime.
Depuis notre arrestation le 2 mars 2022, nous avons passé huit mois dans les geôles du SBU (Service de sécurité ukrainien), où nous avons subi des coups, des tortures, des abus, et avons été privés de sommeil et isolés dans des conditions inhumaines, comparables à celles de Guantanamo.
Nous sommes désormais assignés à résidence équipés de bracelets électroniques. Le régime de Zelensky nous a privés de tout moyen de subsistance, de toute source de revenu : notre état d’arrestation nous prive de la possibilité de travailler, ils cherchent à nous enfoncer dans la pauvreté extrême pour essayer de nous briser, pour que nous capitulions.
Battu comme George Floyd
Nous avons été arrêtés sans procès ni enquête, sans avocat. Kidnappés, nous avons été battus jusqu’à l’état animal lors de l’arrestation, étranglés jusqu’à perdre connaissance (comme George Floyd). Emmenés dans les sous-sols du SBU, nous y avons subi quatre jours de tortures, du 2 au 6 mars 2022.
Menottés toutes les deux heures, battus à coups de crosses de fusils et de pied, ils nous ont cassé les côtes, brisé les dents, fracturé le nez, et même arraché le nez d’Alexandre. Camarades, que peut être la chose la plus terrible à infliger à un être humain, à un homme ? C’est la torture de sa famille et de ses enfants ! Le SBU a également menacé de violer la fille de Mikhaïl, âgée de 13 ans, devant ses yeux, s’il ne cédait pas, s’il refusait de se soumettre à leurs exigences. Leurs actes ont dépassé toutes les limites de l’inhumanité. Lorsque nous avons été présentés pour la première fois à un interrogatoire, après plusieurs jours de torture, nous étions mutilés, incapables de marcher ou denous asseoir seuls. Ils ont dû nous porter. Nous ne nous sommes même pas reconnus, bien que nous soyons frères jumeaux et avons vécus ensemble toute notre vie. Au lieu de mon frère, c’était un tas de chair défiguré par les coups, couvert de plaies.
L’objectif des services spéciaux était de discréditer le Parti Communiste et le Comité antifasciste d’Ukraine. En tant que leaders du mouvement de gauche en Ukraine, le régime exigeait que nous nous calomnions, ainsi que nos camarades.
Selon le régime de Kiev, être communiste et antifasciste signifie forcément travailler pour la Russie, mais c’est faux !
Nous savions que la vie de centaines de communistes et d’antifascistes en Ukraine dépendait de notre résistance. Nous avons refusés de commettre cet acte de trahison malgré les menaces de mort : mieux vaut mourir que trahir !
C’est précisément à de tels abus et tortures que le citoyen américain Gonzalo Lira enfermé dans une prison ukrainienne n’a pas survécu, mourant à la suite des blessures lui ayant été infligées.
Après les déclarations massives et décisives de la Fédération Mondiale de la Jeunesse Démocratique, des militants de gauche et des antifascistes, le régime a été contraint d’annoncer que nous étions vivants et détenus : nous avons survécu grâce à la pression des camarades communistes et antifascistes du monde entier. Puis nous avons été transférés dans des prisons, sans soins médicaux et pratiquement sans nourriture, comme beaucoup d’autres personnes sont enfermées en Ukraine.
Au début, le centre de détention provisoire de Kiev a refusé de nous accueillir et de nous traiter, craignant que nous mourions et que la prison soit tenue responsable de notre mort, et non le SBU. Sur nos cartes de prison, nous avions une terrible mention « criminels particulièrement dangereux », et nous étions donc traités comme des terroristes. Nous étions maintenus en prison sans décision de justice, car nous étions tellement battus et mutilés qu’ils ne pouvaient nous montrer à personne.
Pendant que le régime attendait depuis deux mois que les traces de torture et de coups cicatrisent, nous étions allongés sur le sol en béton de la cellule de prison comme des animaux, sans soins médicaux et sans espoir de vie.
Pour la première fois en mai 2022 nous avons été emmenés au tribunal et avons vu notre avocat. A ce moment là, ils ont essayés de nous forcer à admettre des crimes inventés, non existants contre le régime de Zelensky. Comme nous avons refusés, nous avons été jetés dans une cellule surpeuplée avec des nazis et des meurtriers.
Nous n’oublierons jamais ce jour. Sur un mur de la cellule était accroché un drapeau de l’Allemagne nazie, et le livre “Mein Kampf” de Hitler trainait sur un banc. Le but du régime était toujours de nous détruire, de nous briser. Il a échoué avec la torture et l’isolement, donc il a essayé en nous mettant nous, communistes, avec les nazis et les racistes violents et condamnés.
La cellule n’était pas large, faites pour 12 personnes mais nous étions 20 à l’intérieur. Nous n’avions pas suffisamment de lits donc nous y dormions à tour de rôle. Alexander était enfermé dans les mêmes conditions mais dans un bâtiment différent. Nous étions sans cesse attaqués, affamés et privés de sommeil. Mais nous sommes communistes et ne pouvions pas céder face au régime d’Ukraine.
“Nous ne capitulerons pas”
Nous avons refusé de capituler. En toute circonstance, nous résisterons. C’est ce que nous avions décidé dans les geôles du SBU. Peu importe ce qu’ils nous font, nous ne cèderons pas et préférons mourir que d’avouer les fausses déclarations nous incriminant nous, le Parti communiste et le Comité antifasciste d’Ukraine.
En conséquence, nous avons été officiellement condamnés par l’article 109, parties 1 et 2 du Code Pénal d’Ukraine (rébellion armée et tentative de prendre le pouvoir). Apparement nous deux, armes en main, voulions tenter un coup d’état contre Zelensky et prendre le pouvoir en Ukraine!
La Russie combat en Ukraine depuis 3 ans et ne peut pas faire ça mais nous, deux communistes et antifascistes, les frères Kononovich, pensions y arriver seuls.
Il n’y a jamais eu accusation plus stupide dans l’histoire de l’humanité!
Sous la pression de camarades communistes et d’actions à l’internationale en notre soutien, – #FreeKononovich – , et grâce à l’aide sans précédent des antifascistes en Europe, nous avons été relachés, assignés à résidence avec bracelet électronique. Maintenant, il y a des procès d’affaires criminelles fabriquées contre nous, les frères Kononovich. Le gouvernement veut nous mettre pour 10 ans en prison avec confiscation de propriété juste parce que nous sommes communistes et antifascistes. Regargez, camarades américains, la “démocratie” que les Etats Unis, l’Europe et l’Otan nous imposent en Ukraine ! Les droits humains n’existent pas en Ukraine aujourd’hui. Les gens sont privés de leurs droits comme du bétail. Les ukrainiens veulent la paix, contrairement au gouvernement corrompu. Nous voudrions attirer l’attention des communistes et antifascistes américains sur la répression en Ukraine de centaines de milliers de militants politique, sur les dizaines de milliers en prisons, dont des milliers de communistes et d’antifascites d’Ukraine, tout ceux qui luttent pour la paix.
Nous pouvons citer plusieurs camarades précis, ceux qui comme nous, n’ont rien à perdre ou à craindre. Nous sommes tous poursuivis par la justice ou avons déjà subi une condamnation justifiée exclusivement par les articles de répression politique. Il y a le Secrétaire du Comité Central du Parti Communiste d’Ukraine, la tête du Comité Anti-Fasciste d’Ukraine, Georgy Buiko, accusé par l’article criminel 110, risquant 10 ans de prison avec confiscation de propriété pour “atteinte à l’intégrité territoriale”. Ce dossier est fabriqué, monté de toutes pièces dans le seul but de se débarrasser de toute critique politique.
Le membre du Komsomol Sergei Novikov a été condamné à 5 ans de prison, selon l’article 436, pour avoir soi-disant “reconnu l’OTAN coupable du déclenchement de la guerre en Ukraine”. Ce dossier est fabriqué, monté de toutes pièces.
Le membre du Comité Central du Parti Communiste Yuri Petrovsky a été condamné à 15 ans de prison ferme avec confiscation de propriété, par l’article 111, pour “activité subversive”, pour avoir plaidé pour la paix. Ce dossier est fabriqué, monté de toutes pièces.
Le membre du Comité anti-fasciste et communiste Anatoly Miruta, handicapé (maladie cardiaque), a été condamné à 10 ans de prison avec confiscation de propriété, par l’article 111, “activité subversive”, pour avoir plaidé pour la paix. Pour quelqu’un souffrant de maladie cardiaque, c’est une peine lourde et sévère. Ce dossier est fabriqué, monté de toutes pièces.
Si nous devions lister tous les condamnés, membres du Komsomol, communistes et antifascistes réprimés, cela prendrait des mois. Tous nos camarades n’ont pas eu la chance de survivre à ce conflit, comme notre ami, l’anti-fasciste Vladimir Novikov, qui n’a pas supporté la torture et les abus en prison. Il s’est pendu dans sa cellule avec un drap aux barreaux de la fenêtre. Il a mis fin à ses jours comme un vrai anti-fasciste, sans céder face aux fascistes et sans trahir ses camarades et ses idées ! Commémorons la mémoire des héros anti-fascistes tombés au combat !
Le Parti communiste banni
Nous, communistes antifascistes d’Ukraine, sommes traités en hors la loi pour la première fois dans l’Europe de l’après-guerre. Le Parti Communiste d’Ukraine est officiellement interdit, comme dans l’Allemagne nazie d’Hitler. Nous sommes physiquement exterminés et détruits sous les applaudissements du monde occidental.
Aujourd’hui, l’Ukraine est un laboratoire pour la mise en œuvre de politiques coloniales modernes. Les prochaines victimes de ces politiques pourraient être vous, camarades des États-Unis. Nous, communistes et antifascistes d’Ukraine, vous appelons à agir et à lutter, à être actifs et forts. Vous n’avez d’autre choix que notre extermination physique et la répétition du sort des communistes ukrainiens.
Camarade, vous êtes plus fort que vous le pensez ! Grâce à vous et votre soutien, nous, les communistes Mikhail et Alexander Kononovich, avons survécu. Sans chercher à créer du pathos ou à exagérer, nous vous devons, camarades communistes et antifascistes d’Europe, de l’Amérique du sud et du nord, nos vies. Camarades communistes et antifascistes américains, nous voulons attirer votre attention sur le fait que nous avons besoin d’aide et de votre soutien. Nos vies et celles de nos camarades en dépendent. Nous appelons tous les communistes et antifascistes à agir et à lutter, et à lancer des actions pour nous soutenir #FreeKononovich devant les ambassades et consulats ukrainiens. Votre soutien est crucial.
P.S.
Mikhaïl et Alexandre Kononovitch : Nous sommes communistes, nous ne pouvons pas perdre ! Et si nous perdons, alors nous ne sommes pas communistes !